9 Février 2010
L'expérience du film collectif : du 8 février au 27 mars.
Comment se fait un film à plusieurs ? Est-ce additionner les regards. Est-ce collectionner les subjectivités? C’est, avant tout, expérimenter une autre poétique du cinéma qui associerait pédagogie et politique. A l'École documentaire de Lussas, les étudiants du Master 2 Réalisation Documentaire se confrontent à cette pratique du film collectif. Un temps d’apprentissage de 7 semaines pendant lequel « réaliser » s’invente et se définit au moyen de l’appropriation collective des outils d'expression.
Pierre Hanau
"Par exemple dans le rock - l'autre chose que j'aurais aimé faire - on est en bande, on monte dans une voiture, on joue, quand c'est fini on boit, on parle, on essaie de faire une autre chanson... C'est relativement démocratique, il y a un peu de plaisir, un peu de douleur, et de souffrance partagés..."
Pedro Costa
A lire : Cinéma documentaire et pratiques collectives le séminaire dirigé par Pierre Hanau pendant les Etats Généraux du film documentaire autour de la projection du film collectif 2007 "Nous autres".
A lire : l'article sur le montage et la projection du film collectif 2009, "Les habitants".
Cette année, l'expérience du film collectif est menée par Ingrid Gogny, réalisatrice et productrice de films documentaires (Chargé de famille, d'Ingrid Gogny), et de fictions (La main sur la gueule, d'Arthur Harari). Ingrid sera assistée par Hélène Motteau et Stéphanie Régnier (9° promotion du master) puis l'accompagnement de ce montage sera assuré par Agnès Bruckert (du 8 au 27 mars). L'expérience, qui est un vrai démultiplicateur d'apprentissages, est réalisée en un mois d'écriture et de tournage, trois semaines de montage, pour des films collectifs qui font généralement une durée d'une heure.
"Découvrir l'objet autrement parce que d'autres le regardent".
Séance de travail collectif avec Stéphanie Régnier et Hélène Motteau
La veille du premier jour du tournage, Ingrid Gogny a lu aux étudiants un extrait des Ecrits 1926-1971 de Jean Renoir (Paris 1974) :
"Pour se frayer un chemin à travers la jungle, il est bon de frapper devant soi avec un bâton pour écarter les dangers invisibles. Quelquefois, le bâton rencontre une branche solide et se brise dans vos mains ; quelquefois il résiste, mais votre bras reste tout engourdi. C’est un peu ce que j’ai fait pendant ces dernières années. Je ne voulais pas rester en place. Mais l’aiguille de la boussole que je consultais était folle, et il m’était bien difficile de trouver la direction. J’en suis d’ailleurs très fier. Cela prouve que je n’ai pas perdu le contact avec le monde instable. Peu peuvent prétendre de savoir où ils vont. Que ce soient les individus, les groupes, les nations, le hasard est leur guide. Ceux qui marchent vers un but précis le doivent plus à leur instinct qu’à leur intelligence. Quand j’ai fait la règle du jeu, je savais où aller. Je connaissais le mal qui rongeait mes contemporains. Cela ne veut pas dire que j’ai su comment donner une idée claire de ce mal dans mon film. Mais mon instinct me guidait. La conscience du danger me fournissait les situations et les répliques et mes camarades étaient comme moi. Comme nous étions inquiets ! Je crois que le film est bon. Mais cela n’est pas tellement difficile de bien travailler quand le compas de l’inquiétude vous indique la vraie direction".